lundi 13 septembre 2010

Renaissance vs. Révolution












Après l'incroyable prolifération de jeux et de suppléments sous licence d20 et OGL, le calme semble être revenu dans le petit monde du JDR. La nouvelle mouture de D&D étant sortie sous une licence beaucoup plus restrictive que l'OGL, la plupart des éditeurs ont renoncé à l'utiliser.

L'OGL, chronique d'une mort annoncée

Beaucoup ont critiqué ce retour en arrière de Wizards of the Coast mais je trouve cela assez injuste. Quoi que l'on pense de leurs choix éditoriaux, de leurs pratiques commerciales et de l'intérêt de leurs produits, on ne peut nier l'investissement en temps et en argent que les magiciens de la côte ont consacré au jeu (ni le fait que ce sont eux qui lui ont évité de disparaître complètement).

Peut-on leur reprocher d'avoir renoncé à l'OGL qui fournissait à des éditeurs tiers la possibilité de les concurrencer sur leur propre terrain? Si je considère ma propre bibliothèque d20, force est de constater que les produits Wizards y sont en minorité. J'ai bien plus de Malhavoc, de Green Ronin et de livres de petits éditeurs indépendants.

Or Wizards est une entreprise et, à ce titre, il est légitime qu'elle cherche à réaliser un profit et à préserver son patrimoine (le fameux "product identity"). N'est-ce pas la raison pour laquelle Microsoft renâcle tant à livrer ses codes source?

L'OGL était un cadeau dont Wizards n'avait probablement pas mesuré la portée réelle. Mais le fait que la filiale d'Hasbro y ait renoncé s'avère tout aussi bénéfique selon moi. Car en découplant l'OGL de D&D, il redevient possible d'imaginer de nouvelles voies, de nouveaux jeux.

Jeu de rôle et révolution

Un certain nombre d'éditeurs indépendants s'en sont rendu compte avant même la mort programmée de la troisième édition. Rejetant l'hégémonie du d20, ils s'étaient lancés dans l'exploration de nouveaux paradigmes rolistiques. Parmi ces jeux d'un genre nouveau, citons pêle-mêle le Fate System (et son application, l'excellent Spirit of the Century), Active Exploits (JDR sans dés) ou encore Universalis qui se propose même de débarrasser le JDR du meneur de jeu (sacrilège!)...


Ces éditeurs trouvèrent un distributeur aussi enthousiaste que zélé en la personne de Brennan Taylor (auteur du méconnu mais très sympathique "fantasy heartbreaker" Legend of Yore et de l'excellent Mortal Coils). La création de Indie Press Revolution offrit à ces éditeurs un véritable tremplin qui leur permettait de sortir de l'anonymat.

Il serait vain de prétendre résumer les axiomes de cette révolution qui n'est après tout que l'agrégation d'auteurs très différents. Mais je distingue au moins une préoccupation commune à la plupart d'entre eux: le refus de tout système de règles unniversel et l'idée que le mécanisme d'un jeu doit refléter son thème.

Tel le phénix renaissant de ses cendres...

Parallèlement à cette révolution créative, un certain nombre de joueurs et d'éditeurs parvenaient à la conclusion qu'en démultipliant le nombre d'options proposées aux joueurs (dons, classes de prestige, systèmes spéciaux du "Book of the 9 swords" ou du "Tome of magic"), les auteurs successifs de D&D avaient fait du jeu une véritable usine à gaz.

La lecture du "Rules Compendium" est à ce sujet édifiante: 160 pages de règles qui constituent presque toutes des exceptions à la règle de base (d20+score comparé au FD). L'ouvrage se lit plus comme un manuel de programmation informatique que comme un appel à l'imaginaire. Monte Cook (l'un des concepteurs de la 3ème édition) a expliqué que les auteurs avaient cherché à récompenser les joueurs qui devenaient des spécialistes du jeu. L'objectif semble avoir été atteint et probablement dépassé...

Les partisans de l'OSR (old school renaissance) militaient pour un retour à plus de simplicité, arguant que moins les joueurs (et meneurs) passeraient de temps à ingérer/comprendre/appliquer des règles complexes, plus ils auraient le temps de jouer et de développer leurs histoires.

Les premiers tenants de cette théorie furent probablement Troll Lord Games avec leur Castles & Crusades. S'ensuivit une vague de jeux qui s'appuyaient sur l'OGL pour réécrire d'anciennes éditions: Swords & Sorecry, OSRIC, Labyrinth Lords... Tout comme dans le cas de la révolution, il s'agit généralement d'auteurs indépendants et de petits éditeurs. Mais nombre d'entre eux utilisent Lulu pour publier leurs créations et se sont regroupés sous une même bannière.

Les deux faces d'une même médaille?

Il serait facile de voir dans cette Renaissance et cette Révolution l'opposition frontale entre deux visions irréductibles du jeu de rôle: tenants de l'Old School pur et dur contre avant-gardistes ludiques. Mais ce serait méconnaître le fait que ces deux courants sont nés du même rejet de règles complexes et rigides au profit de systèmes plus centrés sur la narration.

Il serait plus juste en réalité de mettre en parallèle ces deux mouvances et les partisans du "rule light" qui s'opposaient aux simulationistes à la fin des années 80. Que nous disent-ils? Que l'histoire est plus importante que le système de règle et que ce dernier doit toujours être au service de cette histoire.

Voilà un axiome tout simple que le système d20 nous avait peut-être fait perdre de vue avec ses listes de dons, ses conditions d'accès aux diverses classes de prestige, ses listes interminables de compétences et ses monstres en forme de tableaux de bord... L'old school et la nouvelle vague se rejoignent lorsqu'ils rejettent l'optimisation au profit de la narration.

Au lieu de pleurer la fin de l'OGL (qui survit d'ailleurs très bien sans D&D), nous devrions nous féliciter de la fin de cette hégémonie du d20 qui marquera peut-être le renouveau d'une diversité salutaire pour notre hobby.

1 commentaire:

  1. Même sous licence OGL la créativité est possible. Je ne parle qu'au niveau des règles car pour l'univers ça ne fait aucun doute.
    Finalement le système propose :
    + une modélistatin des personnages par caractéristiques, compétences et talents
    + un modèle de résolution d'une action D20+score compétence+modif carac Vs score de difficulté.

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